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AVIS : Le Neveu d'Amérique - Luis Sepulveda

Publié le par Nik'talope

Ma chronique sur Instagram est ici !

 

   Je ne connaissais pas spécialement Luis Sepùlveda avant que mon prof ne me demande de le lire, ainsi j'ai appris qu'il était mort en avril dernier... Après avoir lu son livre, je peux objectivement dire que c'est une perte bien triste.

  Sans compter celui-ci, j'ai lu deux livres hispaniques et j'ai toujours trouvé le style particulier, presque exotique en fait. J'ai retrouvé cette sensation ici, mais à aucun moment ça ne m'a gêné.

 

Le neveu d'Amérique de Luis Sepùlveda, Métaillié (Suites), 2017, 173 pages

 

De quoi ça parle ?

 

  Durant sa vie, Luis Sepùlveda a pris quelques notes : souvent de sa vie, parfois d'anecdotes volantes, quelques fois contant l'histoire d'un autre, mais ce livre parle avant tout de Sepùlveda et de sa rencontre avec monde. Le commencement se déroule au Chili, durant son enfance lorsqu'il fait une promesse à son grand-père, qui sera le point de départ d'un grand voyage...

 

Mon avis

 

   Au départ, j'étais pas mal embêtée : pas mal de politique chilienne (déjà que je suis nulle en politique française... mon historique est plein de termes du genre !😆) et un peu de militaire : j'étais larguée quoi ! Et dans un sens, c'est une bonne façon de se remettre en question sur son niveau culturel... et ça fait très, très mal à l'ego quand on pense être cultivé. Très vite – soit au bout d'une trentaine de pages – cette aspect est laissé de côté pour nous offrir l'histoire d'un voyage qui durera toute la vie de Luis et qui débutera à nulle part.

  L'écriture est très franche, comme si l'auteur voulait s'ouvrir à nous de toute son honnêteté, et ne mâche parfois pas ses mots (j'adore !🤩). Son lyrisme prend souvent le dessus, nous offrant des passages de toute beauté, de quoi remplir son carnet de citations ! La chronologie m'a quelques fois échappée, sans que finalement ce ne soit trop déroutant. Ce qui compte ici, ce n'est ni l'envers ni l'endroit : c'est le voyage et les voix qui le porte.

   Une agréable surprise qui se lit avec grand plaisir !👍

 

Pourquoi j'ai voulu le lire ?

 

   Obligatoire dans le cadre de mon DUT.

 

La 4eme de couverture est ici :

 

   Fidèle à la promesse faite à son grand-père d'aller un jour en Andalousie, dans le village de la famille, Luis Sepùlveda emprunte une route pleine de détours. Depuis Santiago du Chili ce voyageur infatigable, curieux de paysages mais surtout de rencontres, nous invite à l'accompagner dans quelques péripéties de sa vie ; de sa découverte, sous la tutelle de vieil anarchiste, d'un militantisme qui l'amènera à la prison et à l'exil dans divers pays d'Amérique du Sud, jusqu'au bonheur du retour, des années après, en Patagonie et en Terre de Feu. Avec un inégalable sens de la rencontre avec les autres, il nous fait connaître des marins, des professeurs amateurs de casinos et de femmes, des filles à marier à tout prix, les vainqueurs d'un championnat de mensonges et un aviateur fou... Un itinéraire personnel vagabond qui ne prend son sens qu'avec l'accomplissement de la promesse faite à son grand-père.

   Incomparable raconteur d'histoires, Luis Sepùlveda transforme la réalité en littérature.

 

 

Quelques citations :

 

pp. 37-38 : « Le pédicure était un civil, un propriétaire terrien que la réforme agraire avait privé de plusieurs milliers d'hectares et qui se dédommageait en participant bénévolement aux interrogatoires. Sa spécialité était de soulever les ongles des orteils, ce qui provoquait de terribles infections.

Je connaissais le cube. Mes six premiers mois de détention avaient consisté en un isolement total dans un habitacle souterrain de forme cubique qui mesurait un mètre cinquante de côté. Autrefois, la prison de Temuco avait abrité une tannerie et le cube servait à entreposer les graisses. Les murs de ciment puaient encore, mais au bout d'une semaine les excréments du prisonnier se chargeaient de faire du cube un lieu plus intime.

On ne pouvait s'allonger qu'en diagonale, mais les basses températures du sud, les pluies et l'urine des soldats incitaient à se recroqueviller et à désirer devenir minuscule afin de pouvoir débarquer sur une des îles de merde flottante qui jonchaient le sol, et suggéraient des vacances de rêve. Je restai là-dedans trois semaines, me racontant des films de Laurel et Hardy, me récitant les romans de Salgari, de Stevenson, de London, jouant de longues parties d'échecs et me léchant les doigts de pied pour les protéger des infections. »

p.39 : « Un jour de juin 1976, mon voyage à nulle part s'acheva. Grâce aux interventions d'Amnesty International je sortis de prison et, quoique tondu et amaigri d'une vingtaine de kilos, je m'emplis les poumons de l'air grisant d'une liberté que limitait la peur de la perdre à nouveau. De nombreux compagnons qui restèrent prisonniers furent assassinés par les militaires. Ma grande fierté est de n'avoir ni oublié ni pardonné à leurs bourreaux. La vie m'a offert de nombreuses et belles satisfactions, mais aucune n'est comparable à la joie de déboucher une bouteille de vin en apprenant qu'un de ces criminels s'est fait trouer la peau au coin d'une rue. Je lève alors mon verre et dis : - Un salopard de moins, vive la vie ! »

pp.44-45 : « Je me sentais harcelé par ces temps de peur.

Dans chaque ville où je m'arrêtais je rendais visite à de vieilles connaissances ou tentais de me faire de nouveaux amis. À quelques exceptions près, la plupart me laissèrent un sentiment amer et uniforme : les gens vivaient dans la peur et en fonction de la peur. Ils en avaient fait un labyrinthe sans issue ; elle accompagnait leurs repas, leurs conversations, et jusqu'aux faits les plus insignifiants de la vie quotidienne étaient entourés d'une prudence honteuse. La nuit, ils ne rêvaient pas de jours meilleurs ou du passé, mais se précipitaient dans le marécage d'une peur obscure et épaisse, une peur passive qui au lever du jour les arrachait du lit les yeux cernés et encore plus effrayés. »

p.91 : « Un professeur argentin m'a raconté une superbe histoire. Un de ses élèves avait écrit à propos de l'horloge : ''L'horloge sert à peser les retards. Il arrive aussi que l'horloge tombe en panne et comme l'auto perd de l'huile, l'horloge perd du temps.''

Qui a dit que le surréalisme était mort ? »

p.111 : « - Et ce ciel ? Et toutes ces étoiles, Baldo ? Un autre mensonge de la Patagonie ?

- Quelle importance ? Sur cette terre nous mentons pour être heureux. Mais personne ici ne confond mensonge et duperie. »

p.113 : « - Cet arbre avait entre huit cent et mille ans. Il devait mesurer dans les soixante-dix mètres, dit-il d'une voix qui ne cherche pas à dissimuler sa tristesse.

- Tu sais quand il a été brûlé ?

- Environ une trentaine d'années.

Trente ans. Une mort récente. Trente ans, c'est à peine un soupir pour l'âge de ces géants vaincus, dont les cicatrices témoignent des ravages du feu. »

 

Genre : Roman contemporain et autobiographique

 

Étiquettes :

Littérature – roman – autobiographie – récit de vie – quête – dictature – prisons – exil – Patagonie – rencontres – voyages – littérature Sud-Américaine – littérature chilienne – littérature hispanique – Amérique du Sud – Chili – littérature contemporaine – 20ème siècle

 

Ma playlist :

Carbon Based Lifeforms – Derelicts (album)

 

Notes : (attention spoils)

 

Page 29 : vraiment bien écrit mais je suis quelque peu... larguée, ouais. Je me rends compte à quel point j'y connais que dalle en politique et militaire ! (le Che, le Mossad, la CNT : keskeu saitre?)

Page 30 : Et maintenant la Terre de Feu... je suis vraiment inculte, c'est pas possible !

Page 31 : « Nous ne connaissions pas encore le fameux syndrome de Stockholm comme perversion militaire. […] après une interrogatoire, il nous remplissait les poches de paquets de cigarettes ou de ces précieuses tablettes d'Aspirine Plus Vitamine C. » : on croirait que l'aspirine faisait office de tablettes de chocolat dit comme ça, c'est rigolo tien !

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